Je n’ai pas encore visionné le nouveau film de Woody Allen « Vicky Cristina Barcelona », mais dieu que j’en ai entendu parler l’été dernier! Résidente de Barcelone depuis maintenant sept ans, je peux dire que la ville, ses habitants, ses visiteurs et ses dirigeants m’enchantent et m’exaspèrent à la fois. Quel tapage publicitaire autour de cette histoire de tournage!
D’un côté, il y a… un immense champ de blocs gris, entassés les uns sur les autres. Quelques-uns adoptent des formes bizarres en tentant de s’approprier le moindre recoin disponible, d’autres s’étirent exagérément vers le ciel, comme pour mieux respirer. (…) Entre les pieds des géants subsistent parfois des maisonnettes d’ouvriers, dont les murs peints à la chaux s’effritent inexorablement sur les trottoirs et dont les portes et les fenêtres sont souvent condamnées. Et puis tout d’un coup, entre les détritus et les murs tachés d’urine, on découvre un bijou de l’Art déco, une perle de l’ère moderne, un chef-d’œuvre né de l’imagination colorée, somnambule, organique, de Gaudí. On entre alors dans la coquille vivante d’un escargot de verre. Un oiseau aux os creux où le vent s’engouffre et se plaint. Un labyrinthe dont les murs respirent de tous leurs pores. Une grotte cachée derrière une cascade limpide. C’est doux, c’est frais comme un fromage blanc. Et on apprend avec délice qu’il y en a d’autres, plusieurs autres. Et on aime alors cette ville clémente, qui laisse éclore la beauté sur un terreau immonde, jonché de la merde des chiens et arrosé de la pisse des hommes.
De l’autre, la Barcelone lascive, ouverte à tous vents, fleurant l’huile solaire et affichant ses courbes pour les touristes. « Benvinguts a la millor botiga del món » scandait un slogan de la mairie « Bienvenus à la meilleure boutique du monde »… ouf! Le centre-ville, effectivement, n’est plus qu’une jolie vitrine pour les voyageurs fortunés qui viennent passer un week-end au soleil. Dommage. J’imagine que Paris, Londres ou Amsterdam souffrent du même mal…
Il faut pénétrer dans les ruelles, fuir les grandes artères, grimper les collines qui l’entourent, venir découvrir cette ville extraordinaire en automne, quand les Barcelonais se réapproprient leurs Ramblas. Là, c’est une toute autre cité qui se dévoile. Authentique, fière et, chose surprenante, plutôt réservée.
J’ai hâte de voir le film de Woody Allen, hâte de voir la Barcelone qu’il a capturée sur pellicule. Bon, la bande-annonce ne dit pas grand’chose… besos, besos y más besos, mais j’ai appris à ne pas me fier aux trailers. C’est à suivre…